POMPÉI, la décoration intérieure

source Encyclopédia Universalis pour les textes

25. La décoration de la maison pompéienne

26. La plupart des peintures sont réalisées entre 63 et 79

27. On distingue quatre styles

28. Les artistes reproduisent le réel, ils donnent l'illusion

29. Un goût prononcé pour l'exotisme du monde égyptien

30. Les peintres excellent dans l'art du portrait, de la nature morte

31. La principale source d'inspiration dramatique reste la tradition homérique

32. Les peintres grecs sont copiés : NICIAS (2e moitié ~ IVe s.)

33. De l’affichage à l’affiche

25. La décoration de la maison pompéienne est très variable quant à la qualité et quant au style.

Maison de la Vénus dans une Coquille

Les fresques de Pompéi constituent le panorama le plus vaste et le plus complet de la peinture romaine qui soit parvenue jusqu'à nous. Celles qui décor les demeures privées sont particulièrement intéressantes. La fresque s'y affirme en effet comme un genre autonome et raffiné, surtout quand, après restauration, la maison a retrouvé sa couverture et, donc, son éclairage d'origine, la lumière étant soigneusement filtré par les cours et par les péristyles.

26. La plupart des peintures sont réalisées entre 63 et 79. Le fait que la plupart des peintures pompéiennes aient été réalisées entre 63 et 79 signifie que plusieurs artistes ont travaillé dans la cité à la même époque. On a pu distinguer la "manière" particulière de quelques-uns d'entre eux. C.L. Ragghianti distingue ainsi le "Maître de la Poétesse", le "Maître de l'Ombre", le "Maître Aulique" (qui a surtout travaillé dans la célèbre maison des Vettii), le "Maître des Raccourcis" le "Maître de la Fable", qui a réalisé Hercule enfant. Certaines de ces dénominations correspondent peut-être à un même artiste dont le style aura évolué durant la quinzaine d'années concernées.

27. On distingue quatre styles. Suite aux études de l'archéologue allemand A. Mau, on a coutume de distinguer quatre styles dans ces peintures murales. Le premier, dit "à incrustation" est non-figuratif et met en valeur les éléments architecturaux (plinthes, corniches) ; exclusivement chromatique, il dure jusqu'à la guerre sociale (début du 1er siècle avant J.-C.).

Pompéi

Pompéi

 

Herculanum : maison des Samnites

 

Herculanum : maison des Samnites

 

Herculanum : maison des Samnites

 

Herculanum : maison des Samnites

Le deuxième style, qui fleurit ensuite jusqu'à l'époque d'Auguste, est caractérisé par la représentation de constructions plus ou moins fantastiques, d'inspiration hellénistique. Désormais, le mur est parfaitement plat, et c'est la décoration qui donne l'illusion de la profondeur.

 

Herculanum

 

Herculanum

 

Pompéi, les Vettii

 

villa des Mystères

 

villa des Mystères

 

villa des Mystères

 

villa des Mystères

 

villa des Mystères

 

Depuis le règne d'Auguste jusqu'à celui de Claude domine le troisième style qualifié d' « ornementale » : de fines colonnes divisent le mur en panneau, et sa partie supérieure est enrichie de décors architecturaux sans rapport avec les sujets figurant sur les panneaux, ceux-ci apparaissant comme des tableaux accrochés sur le mur ; à cette époque, les artistes se plaisent surtout à peindre des paysages maritimes et des scènes champêtres.

 

les Vettii

 

les Vettii

 

les Vettii

 

les Vettii

 

les Vettii

 

les Vettii

 

les Vettii

 

les Vettii

 

les Vettii

 

les Vettii

 

Herculanum

 

Herculanum

 

Herculanum

 

Herculanum

 

Le quatrième style, enfin, que l'on situe entre le règne de Claude et l'éruption de 79 après J.-C., préfère le mur "ouvert", débarrassé du "cadre" qui caractérise la période précédente.

 

Herculanum

 

villa des Vettii

 

28. Les artistes reproduisent le réel, ils donnent l'illusion. Les habitants de Pompéi demandaient surtout aux artistes qu'ils reproduisent le réel, qu'ils leur donnent l'illusion de vivre à la campagne ou dans des jardins quand ils se trouvaient dans leurs confortables demeures. Ces représentations sont relativement conventionnelles et certains lieux sont évoqués par leurs éléments caractéristiques : bois sacré, troupeau de vaches, berger et son bélier, le tout constituant le genre "sachro-idyllique". Si, dans le premier style, l'univers de la nature et des jardins reste bien encadrée par le décor architectural, dans le deuxième la nature prend le dessus et devient le véritable décor, chargé parfois d'une valeur symbolique.

29. Un goût prononcé pour l'exotisme du monde égyptien. Les peintres pompéiens et leurs commanditaires manifestent un goût prononcé pour l'exotisme des scènes nilotiques peuplée de Pygmées et d'animaux divers, aussi étrangers au monde romain que les crocodiles et les hippopotames. L'influence grandissante de la religion isiaque encouragait sans doute les artistes à s'inspirer du monde égyptien soumis à Rome depuis près d'un siècle.

30. Les peintres excellent dans l'art du portrait, de la nature morte. L'une des plus belles réussites de la peinture pompéienne réside sans doute dans l'art du portrait. Certains, comme celui de la poétesse pensive, qui tient son style entre ses lèvres, sont d'une facture toute académique, et il est évident que le modèle à "posé". Les pompéiens appréciaient également beaucoup les natures mortes, dont ils ornaient leurs salles à manger et qui représentaient des fruits, des légumes ou des gibier divers ; dans la salle à manger de Julia Félix, une coupe de cristal contient des pommes et des grenades si bien rendues que l'on peut croire qu'elles attendent d'être consommées.

31. La principale source d'inspiration dramatique reste la tradition homérique. Le public de l'époque aimait aussi des scènes grotesques inspirées par les farces que le théâtre comique offrait aux plus humbles. Plus soucieux de prestige, les riches patriciens affectionnaient les évocations de la vie dans les cours hellénistiques. La principale source d'inspiration dramatique reste cependant la tradition homérique. De toutes les divinités, Vénus est la plus honorée, et les représentations de ses amours avec Mars sont très fréquentes. Avec Dionysos, elle exprime le souci qu'avaient les pompéiens de la vitalité sexuelle, également évoquée sur les murs des chambres conjugales et dans le lupanar de la ville. les scènes mythologiques et les paysages – nilotiques, portuaires et « paradisiaques » – caractérisent la peinture alexandrine. Sommet de la peinture antique, les fresques pompéiennes furent réalisées pour de riches provinciaux, qui profitaient au maximum de la pax romana, mais qui apparaissent le plus souvent comme des parvenus avides de culture et soucieux de s'assurer la bienveillance familière des dieux.

 

32. Les peintres grecs sont copiés : NICIAS (2e moitié ~IVe s.). Plutarque considère le peintre Nicias comme un des maîtres les plus célèbres de la peinture athénienne (Moralia, 346 A, 1093 E). Pline place son akmé (sommet de son activité) dans la CXIIe Olympiade (~332~ 329) (Histoire naturelle, XXXV, 130 sq.). Nicias serait le peintre qu’employa Praxitèle pour vernir à la cire ses marbres, ou les rehausser de couleurs. Il devait être plus jeune que le sculpteur puisqu’il rencontra Ptolémée Ier en ~315. Selon Pline (Histoire naturelle , XXX), Nicias utilisait la technique de l’encaustique ainsi que l’usage du fumet (cinabre brûlé), inventé lors d’un incendie. Son style se distinguait par la mise en valeur des corps au moyen de contrastes de lumières et d’ombres : « Lumen et umbris custodit... », écrit Pline. Il affectionnait les grandes compositions et la peinture des corps féminins. L’œuvre de Nicias est entièrement perdue. On la connaît par la littérature antique (Pline, Pausanias, Plutarque, Démétrios) et par des transpositions d’époque romaine. Deux copies sont particulièrement intéressantes : la première, Persée délivrant Andromède, provient de la maison des Dioscures, à Pompéi ; elle date du Ier siècle, d’après un original exécuté vers ~ 330 (musée national de Naples). La mer forme, avec les rochers, le cadre naturel de la scène. L’éclairage, à la fois brutal et diffus, met en valeur les reliefs des corps entourés d’ombres. La seconde, Io surveillée par Argos, d’une exécution parfaite, représente le moment où Hermès arrive pour libérer l’héroïne. Les deux œuvres offrent de nombreuses similitudes : composition de la scène, clarté des fonds et accentuation des ombres et des lumières. L’attribution de ces deux répliques à des copies de Nicias semble certaine ; d’après Pline, en effet, Nicias se préoccupait de faire ressortir nettement les figures sur le fond, et ce trait caractérise les deux œuvres. APOLLODORE LE SKIAGRAPHE (fin ~Ve-déb. ~IVe s.) Peintre athénien. Surnommé le peintre des ombres, Apollodore le Skiagraphe est associé à Zeuxis dans la conquête primordiale qu’effectua à cette époque la peinture grecque, la maîtrise de la lumière. Peu auparavant, Agatharcos avait résolu le problème de l’espace et du rendu des différents plans : il avait, en effet, mis au point les premières tentatives pour traiter les différents plans d’un tableau en perspective. Perspective encore schématique et conventionnelle dont il avait conçu les éléments dans une mise en scène préparée pour la représentation d’une pièce d’Eschyle. Apollodore complète cette conquête du dessin par la maîtrise des effets tirés, dans le même dessein, des ombres et des contrastes de clair et d’obscur. Il s’agit dans les deux cas de composer et d’organiser l’espace pour faire valoir les volumes, pour représenter les personnages en mouvement dans la troisième dimension. Il faudra encore du temps aux artistes pour explorer ce nouveau domaine, mais des œuvres du ~IVe et du ~IIIe siècle, dont nous avons le reflet dans les mosaïques et dans les peintures pompéiennes, nous permettent de suivre les diverses étapes de cette conquête. On est tenté d’attribuer à l’école d’Apollodore le beau marbre peint trouvé à Pompéi et représentant le groupe animé et si harmonieusement composé des joueuses d’osselets, conservé au musée de Naples. PHILOXÉNOS D’ÉRÉTRIE (fin ~IVe-déb. ~IIIe s.), peintre hellénistique. Philoxénos d’Érétrie est l’auteur présumé de la Bataille d’Issos, exécutée pour le roi Cassandre (~301-~297). Cette œuvre est connue par deux répliques en mosaïque : la première, provenant d’Alexandrie, fut trouvée à Rome près du temple de la Paix, la seconde, conservée au Musée national de Naples, date du ~IIIe ou du ~IIe siècle et provient de la maison du Faune à Pompéi. Cette peinture monumentale est dramatique, car l’artiste a représenté l’issue désespérée du combat pour Darius, qu’un noble perse protège en s’offrant à la lance d’Alexandre et dont le cocher fait déjà fuir le char. Grâce à des effets de perspective, la disposition des personnages donne l’impression d’une grande multitude de guerriers aux lances levées vers le ciel.

Philoxénos était le disciple de Nicomachos de Thèbes, spécialiste de grandes compositions de caractère historique ou religieux. Il peignit aussi une bataille d’Alexandre, vantée par Pline, et peut-être une chasse d’Alexandre, connue par un fragment de mosaïque provenant de Palerme. Son art est caractérisé par le résumé et la science du raccourci, comme par la précieuse minutie de la peinture à laquelle le chromatisme confère un effet lumineux. POLYGNOTE DE THASOS (~500?-~440 env.), peintre grec originaire de l’île de Thasos. Fils et élève d’Aglaophon, Polygnote de Thasos exerce son art dans la période qui suivit les guerres médiques. Il semble que l’art de Polygnote a beaucoup influencé le décor des vases quand celui-ci a perdu son esprit inventif (seconde moitié du ~Ve s.). Le caractère expressif de son œuvre qui souligne les sentiments des personnages est rappelé par Pline: « Il fut aussi le premier à apporter à la peinture ces grands perfectionnements qui consistent à entrouvrir la bouche, à montrer les dents, à substituer à l’ancienne raideur du visage des expressions variées ». Polygnote, qui était aussi bronzier, paraît avoir fortement tenu compte des volumes et de l’espace dans cet art essentiellement graphique qu’est la peinture. Ses figures sont représentées dans un paysage rendu réel par la présence de plantes et de rochers. Elles sont étagées et souvent placées de trois quarts. Cette animation est l’un des aspects de l’art polygnotéen qui sera le plus retenu par les peintres de vases. D’inspiration surtout héroïque et légendaire, les thèmes favoris de l’artiste connaîtront encore une vogue importante à l’époque hellénistique, et les peintures de Pompéi s’en feront l’écho. DIOSCORIDE DE SAMOS (2e moitié ~IIe s.) Mosaïste grec. Dioscoride de Samos (ou Dioscouridès) est un des rares artistes connus de l’école micrasiatique. Il est célèbre grâce à deux petits panneaux trouvés à Pompéi dans la villa de Cicéron : Les Musiciens ambulants du culte de Cybèle et Scène de comédie : une visite chez la magicienne (Musée national, Naples). Copiste de célèbres peintures du ~IIIe siècle, il utilisait les techniques du milieu du ~IIe siècle tout en restant fidèle aux originaux. Ces mosaïques restent les meilleurs témoins de la peinture hellénistique. Dans son art d’une composition simple, d’une saveur tout hellénistique par les sujets et le traitement des personnages, par la richesse de la polychromie, Dioscoride introduisit les effets d’ombres projetées suivant une convention d’atelier qui imagine les figures vues à la lumière du soleil.

33. De l’affichage à l’affiche. L’affiche est la conséquence lointaine de la nécessité de faire connaître, par affichage, les décisions de l’autorité ou les événements qui intéressent la collectivité. On sait que dans les cités grecques on utilisait des panneaux de bois mobiles connus sous le nom d’axones et que les citoyens romains traçaient leurs dipinti sur un mur blanchi à la chaux et divisé en rectangles – l’album. À Pompéi, on peut voir la marque encore bien lisible d’un affichage élaboré.